Avec “I PECCATI”, catalogue éponyme de l’exposition présentée à l’Académie de France à Rome – Villa Médicis, Johan Creten orchestre un ensemble d’œuvres iconiques de sa carrière.
Pensée en collaboration avec Noëlle Tissier, commissaire de l’exposition, “I PECCATI” réunit pour la première fois et avec une telle ampleur en Italie, un ensemble de cinquante-cinq œuvres témoignant de la sensibilité de l’artiste face aux profondes mutations de la société et une conscience morale plus que jamais ébranlée. Aux côtés de ses œuvres en bronze, en céramique et en résine, l’artiste présente une sélection d’œuvres historiques des XVème, XVIème et XVIIème siècles, issues de sa collection personnelle.
Décomposé en 12 sections révélant 12 plaies sacrilèges et impures, l’ouvrage « I PECCATI » plonge le lecteur dans les abimes d’une création prolifique et protéiforme, nourrie de références historiques, de connexions cachées et de surprises intellectuelles et artistiques.
Chaque partie, placée sous le symbole ambivalent et duel d’une moralité subjective et imparfaite, est introduite par un texte de Colin Lemoine questionnant la relation de l’Homme au péché, entre adoration et blasphème.
Nicolas Bourriaud revient quant à lui, dans son texte introductif, sur l’œuvre de Johan Creten, hantée par les notions de bien et de mal, d’exorcisme et de volupté.
“L’ensemble des réactions chimiques qui se déroulent au sein d’un être vivant et lui permet de se maintenir en vie, de se reproduire, de se développer ou de répondre aux sollicitations de son environnement, s’appelle le métabolisme. Dans le monde animal, les couleurs et les motifs relèvent de cette dimension vitale. Plumages, poils, écailles, peaux, livrées et carapaces, zébrures et tâches, peuvent ainsi être considérés comme des organes de l’apparaître, comme autant de formules plastiques permettant à un organisme, au-delà des fonctions vitales et de la lutte pour la survie, une sorte d’autoprésentation. Le zoologue suisse Adolf Portmann (1897–1982) nommait ces motifs des « phanères » et inventa même le terme « phanérologie » : la science des apparences animales. Les êtres humains ne sont pas en reste. Seulement, ils se sont développés en externalisant leurs facultés, là où les autres espèces se contentent de prolonger leur propre corps. Plutôt que pour la division du travail organique, en cours dans le règne animal, les humains ont ainsi opté pour un corps peu performant, et toutefois infiniment customisable. Ainsi, si le papillon se crée lui-même comme un tableau, les humains préfèrent produire celui-ci sur un support extérieur. L’artiste pourrait alors se définir comme le papillon du règne humain : il/elle se livre à une production gratuite et flamboyante de signes et de formes. L’art constitue une forme de vie spécifique, qui n’est pas réductible à une production d’objets.”